Le psoriasis en gouttes
Qu’est ce que le psoriasis en gouttes ? Comment le reconnaître ?
Le psoriasis en gouttes est une forme de psoriasis, particulière du fait de son aspect clinique et de son mode de survenue parfois en réaction à une infection de la gorge (angine).
Il touche essentiellement les enfants et les adultes jeunes. Dans les études sur le psoriasis, il représente 10 à 30% des cas de l’enfant (1). Le psoriasis en gouttes peut aussi survenir chez un patient qui a déjà un psoriasis en plaques.
Il se présente sous la forme de petites plaques de psoriasis moins épaisses et moins desquamatives que les plaques de psoriasis classique dit vulgaire. Leur taille est inférieure à 1 cm et elles se distribuent de façon rapide et généralisée sur le corps, notamment sur le dos et le torse et les membres, épargnant les paumes et les plantes (Figure 1). Il n’y a en général pas d’atteinte des ongles, ni des cheveux.
Pour le médecin, il faut penser à éliminer d’autres diagnostics comme : le pityriasis rosé de Gibert (infection virale où il existe souvent une plaque arrondie plus grande initiale); le pityriasis versicolor (qui est dû à un champignon bénin de la peau et dont les lésions discrètement squameuses ont un aspect couleur chamois sur peau non bronzée ou blanc sur peau bronzée); une autre infection par champignon étendue transmise notamment par les animaux, plus rare ; et enfin un eczéma dit nummulaire sec (« en pièces de monnaie »). Si besoin, en cas de facteurs de risque, on pensera à rechercher une syphilis ou une infection par le VIH chez l’adulte jeune.
Le diagnostic est le plus souvent clinique mais peut, dans certains cas, nécessiter une prise de sang, ou un prélèvement de squames à la recherche d’un champignon.
Pourquoi fait-on un psoriasis en gouttes ?
Le lien avec une infection est suggéré par plusieurs arguments :
- Les patients signalent souvent une angine 1 à 2 semaines précédant l’apparition ou l’aggravation du psoriasis en gouttes. L’agent infectieux retrouvé est le streptocoque dans 2/3 des cas, ou un virus (2).
- Des études ont montré la présence du streptocoque dans la gorge ou la présence d’anticorps dirigés contre le streptocoque (ASLO) au cours de poussées de psoriasis en gouttes. Il a parfois été mis en évidence la présence de streptocoque ailleurs que dans la gorge (3).
- Enfin, des tests en laboratoire ont montré des réponses de certaines cellules de l’immunité (« les lymphocytes ») contre des antigènes du streptocoque (4).
Il existe par ailleurs un terrain génétique favorisant : le psoriasis en gouttes, notamment post-streptococcique, survient préférentiellement chez des patients exprimant un gène particulier (« HLA-Cw*06 »).
Enfin, une éruption de type psoriasis en gouttes peut aussi apparaître comme une réaction inattendue aux anti-TNF (biomédicaments proposés dans les formes modérées à sévère de psoriasis) ou de façon exceptionnelle après une vaccination (5).
Comment évolue le psoriasis en gouttes et comment se traite-t-il ?
L’évolution du psoriasis en gouttes est variable. Le plus souvent, les plaques durent environ 1 mois puis peuvent disparaitre en 2-3 mois, naturellement, sans traitement. Pour 1/3 des patients, la poussée est unique ; pour un second 1/3 l’évolution se fait vers un psoriasis en plaques sans phase de rémission ; pour le dernier 1/3 une phase plus ou moins longue de rémission précède le développement d’un psoriasis en plaques.
Le traitement du psoriasis en gouttes fait appel à la prise en charge de l’infection lorsqu’elle est retrouvée et encore active. Dans certains cas isolés, le traitement de l’infection streptococcique a été associé à une guérison du psoriasis en gouttes. Le traitement antibiotique de l’infection ORL suspectée est en général une pénicilline. Néanmoins, il n’y a pas de preuves formelles sur l’intérêt de ce traitement sur l’évolution du psoriasis (6). Dans les formes récurrentes, l’amygdalectomie est parfois à envisager, elle a fait l’objet d’études spécifiques ( 7, 8).
On peut aussi proposer un traitement local sur les zones gênantes par dermocorticoïdes ou par l’association calcipotriol – betametasone (Daivobet®). Lorsque le psoriasis en gouttes est très étendu et dure dans le temps, on peut proposer une photothérapie (UVB TL01), et beaucoup plus rarement un traitement par voie générale lorsque le retentissement est important. Les biothérapies comme les anti-TNF, anti-IL12/IL23 ou les anti-IL17 n’ont pas été étudiées dans le cas du psoriasis en gouttes (9).
Notes
(1) Tollefson MM, Crowson CS, McEvoy MT, Maradit KH. Incidence of psoriasis in children: a population-based study. J Am Acad Dermatol. 2010;62(6):979-987.
(2) DERMATOLOGIE ET INFECTIONS SEXUELLEMENT TRANSMISSIBLES. 5ème édition .Jean-Hilaire Saurat, Jean-Marie Lachapelle, Dan Lipsker, Luc THOMAS
(3)Ledoux M1, Chazerain V, Saiag P, Mahé E. [Streptococcal perianal dermatitis and guttate psoriasis].Ann Dermatol Venereol. 2009 Jan;136(1):37-41.
(4) Ruiz-Romeu E, Ferran M, Sagristà M, Gómez J, Giménez-Arnau A, Herszenyi K, Hóllo P, Celada A, Pujol R, Santamaria-Babí LF. Streptococcus pyogenes-induced cutaneous lymphocyte antigen-positive T cell-dependent epidermal cell activation triggers TH17 responses in patients with guttate psoriasis. J Allergy Clin Immunol. 2016 ; S0091-6749(16)00360-2.
(5) Sbidian E1, Eftekahri P, Viguier M, Laroche L, Chosidow O, Gosselin P, Trouche F, Bonnet N, Arfi C, Tubach F, Bachelez H. National survey of psoriasis flares after 2009 monovalent H1N1/seasonal vaccines. Dermatology. 2014;229(2):130-5.
(6) Chalmers RJ1, O'Sullivan T, Owen CM, Griffiths CE. Interventions for guttate psoriasis. Cochrane Database Syst Rev. 2000;(2):CD001213.
(7) Wu W, Debbaneh M, Moslehi H, Koo J, Liao W. Tonsillectomy as a treatment for psoriasis: a review. J Dermatolog Treat. 2014 Dec;25(6):482-6.
(8) Pfingstler LF, Maroon M, Mowad C. Guttate psoriasis outcomes. Cutis. 2016 Feb;97(2):140-4
(9) http://www.therapeutique-dermatologique.org
Rédigé par Dr Nathalie Beneton, Dermatologue Centre hospitalier du Mans, 72000 pour le Groupe de Recherche sur le Psoriasis de la Société Française de Dermatologie