Psoriasis cutané et sport : qu’en est-il réellement ?

Rédigé par Docteur Thierry BOYE Dermatologue à l’H.I.A Sainte Anne TOULON

La pratique régulière du sport pour être en bonne santé est une recommandation OMS pour l’ensemble de la population générale. Elle préconise de pratiquer au cours de la semaine 150 minutes d’activité d’endurance d’intensité modérée (marche, cyclisme, natation….) ou au moins 75 minutes d’activité d’endurance d’intensité soutenue ou une combinaison d’activité équivalente.

Quelles sont les données récentes concernant les patients psoriasiques et la pratique sportive ?

  • Elle est souvent limitée pour de multiples raisons. La première est le caractère affichant de la pathologie qui entraine une adaptation vestimentaire ou une restriction pour certains sports en particulier les activités aquatiques ; la crainte de l’aggravation de la maladie est aussi fréquemment évoquée.
  • Plusieurs études récentes plaident pour le maintien d’une activité physique raisonnée.
  • Le psoriasis est associé à un risque plus important de dépression et d’idées suicidaires. Dans la population générale, ils diminuent chez les personnes qui ont une activité physique régulière ;
  • Il existe une augmentation des événements cardiovasculaires multifactorielle. L’activité physique a un rôle préventif sur ce risque ;
  • La perte de poids souvent associée à la pratique physique favorise la réponse aux traitements systémiques ou aux biothérapies.

Tous les sports ne sont pas « égaux »

Ceux qui génèrent beaucoup de frottement risquent d’induire un phénomène de Koebner, c’est-à-dire l’apparition ou l’aggravation d’une plaque de psoriasis sur la zone de friction. Certains sports de contact sont ainsi à éviter. L’adaptation d’une selle de vélo, d’un vêtement est aussi à considérer.

Les activités aquatiques sont à encourager : il n’y a pas d’effet délétère de l’eau sur la peau psoriasique si elle n’est pas trop chaude ; l’eau salé « pique » les plaques mais une fois rincée à l’eau douce, n’aggrave pas les plaques. Dans une étude, l’association de la marche ou de la natation (30 min par jour 3 fois par semaine pendant 6 semaines) aux exercices d’assouplissement semble agir efficacement sur la qualité de vie, les scores d’activités des patients porteurs de spondylarthopathies. L’aquagym est aussi supérieure aux exercices à domicile sur la douleur. Une étude publiée en 2012 dans JAMA Dermatol montre même, chez 116640 infirmières américaines suivies 14 ans, l’effet protecteur d’une activité physique intense et non de la marche simple sur l’apparition des plaques de psoriasis.

Que faire quand une thérapie systémique ou une biothérapie est instaurée ?

Il n’y a pas de restrictions véritables mais il faut prendre en compte les effets indésirables ou secondaires des traitements :

  • la sécheresse induite par l’acitrétine (Soriatane) ;
  • le risque de crampe lié au manque de magnésium avec la ciclosporine (Neoral)
  • la fatigue liée au méthotrexate (Imeth, Novatrex, Nordimet) ;
  • le risque délétère d’une déshydratation après un effort intense sur l’élimination rénale du méthotrexate ou de la ciclosporine ;
  • le risque de selles plus fréquentes avec l’apremilast (Otezla ) ;
  • le risque variable selon les molécules, des infections en particulier pulmonaires, ORL, herpétiques avec la Cicloporine, le méthotrexate, et les biothérapies. Il faut d’ailleurs souligner qu’un effort physique intense prolongé, type semi-marathon entraine une déplétion lymphocytaire transitoire (diminution temporaire des globules blancs de petite taille) de quelques heures à prendre en compte dans le contexte (ce qui explique pourquoi « nos grand- mères nous disaient de nous couvrir après la course »).

A l’aube des grands rendez vous sportifs qui approchent en France (Coupe du Monde de Rugby), il n’y a aucune bonne raison de refuser d’emblée une activité physique à cause du psoriasis. Il faut savoir opposer « aux regards des autres », notre capacité de gagner ces espaces de liberté physiques et d’épanouissement psychique que sont les pratiques régulières d’activités physiques.

Photo d'illustration par David Marcu